Tu sais, quand mon grand est né, j’ai cherché une quantité infinie de conseils pour être la meilleure mère possible : Fillozat, Gueguen, Ducharme, Alvarez… elles étaient toutes sur la table de mon salon !
Sauf que j’avais oublié une donnée dans tout ça : on ne devient pas une maman calme, patiente et parfaite d’un coup de baguette magique (même quand on est une fée). Car en plus de cette pression que je me mettais chaque jour, j’avais aussi le stress du boulot, mon couple, mes problèmes, ma fatigue, notre quotidien plus qu’intense… et mon propre cerveau à gérer. La vie de beaucoup d’autres mères quoi, non ?
Quand le terrible two et les premiers signes d’hypersensibilité sont arrivés, en bon soldat j’ai redoublé d’efforts (et d’engueulades avec mon mec, on va pas se mentir) : mes livres d’éducation bienveillante sous le bras, je suis partie en croisade contre ce que je considérais être des réflexes d’éducation dépassés et néfastes. Pour mon hypersensible de fils, à mes yeux c’était la clé : la bienveillance, l’éducation positive, zéro VEO, des explications, de la patience, de l’amour… C’était tellement logique !
Je me suis donc retrouvée progressivement à faire un bras de fer permanent avec moi-même, et avec mon homme aussi (et durant un temps ça l’a éloigné de notre fils). Tout ça pour tenter d’atteindre le niveau d’excellence que je caressais du doigt sur Instagram : ces mères zen, pédagogues, toujours à l’écoute, patientes et pleines de bons conseils.
Ah j’ai lutté ! Un peu comme une nana qui fait un régime tu sais : qui change toutes ses habitudes alimentaires, qui se prive, s’affame… pour rentrer dans le jean fétiche de ses 20 ans parce que la minceur c’est la norme. Et qui bien-sûr craque le soir venu face à un Magnum double caramel et pleure toutes les larmes de sa culpabilité une fois la faute commise. Moi, c’était pareil : bienveillance, bienveillance, explications, perte de patience, HURLEMENTS, culpabilité, bienveillance, perte de patience, HURLEMENTS. Et ça tournait en boucle.
J’ai passé plusieurs années comme ça, à réussir certaines journées parce que j’étais en bonne condition pour (bien dormi, pas de problème au boulot…) et à l’inverse, j’enchainais avec des journées à dégoupiller et à m’énerver sur mon fils parce que j’étais crevée, tout simplement. Et que son hypersensibilité mélangée à la mienne donnaient un cocktail explosif.
Après tout ce temps à faire du yoyo, à m’épuiser et à culpabiliser, l’arrivée de notre deuxième a intensifié notre rythme : davantage fatiguée donc encore moins de patience. Et pourtant je voulais du plus profond de mon cœur que mon grand se sente bien et ne souffre en rien de l’arrivée de sa soeur…
Mais cette seconde maternité a provoqué une chose en moi. Au début sourde, puis de plus en plus évidente au fil des mois : plus j’avançais dans ma quête insoluble de la parentalité parfaite, plus je me rendais compte de l’absurdité de tout ça. Et toutes les nouvelles tendances maternelles m’oppressaient : DME, cododo, maternage proximal, HNI, éducation bienveillante, allaitement tardif, couches lavables, portage, nourriture bio, bain libre, langage des signes… Trop d’études, de conseils, de diktats, d’articles, de jugements, trop de « mamatollahs » de la parentalité aussi.
Et moi dans tout ça ? Et mon homme ? Des années après mon premier accouchement je me posais enfin la bonne question : cette auto-injonction quotidienne à être « une bonne mère » n’était-elle pas finalement ultra dangereuse ? C’est bien joli de vouloir être une mère parfaite… mais au prix de quoi ?
Alors attention… Comprenons-nous bien. La bienveillance et l’empathie sont effectivement les principales clés d’une éducation réussie. Et j’adresse un très sincère BRAVO à toutes les mères qui y arrivent chaque jour, qui ne perdent que rarement leur calme, ne crient pas, expliquent, réexpliquent, verbalisent et appliquent à la perfection les conseils des psys. Mais je crois juste que dans cette quête folle de la bienveillance… il ne faut pas s’oublier soi-même, se nier, s’inhiber. Alors j’ai changé ma façon de faire.
J’ai besoin de dire à mes enfants quand je suis heureuse, et j’ai besoin de leur dire quand ça va pas. J’ai déjà craqué et pleuré devant mon fils parce que j’en pouvais plus de nos oppositions. Bien-sûr que je ne suis pas rentrée dans une thèse sur mon mal-être, mais je lui ai dit, simplement, que là c’était trop, que j’étais fatiguée, et que je n’avais plus la force de supporter des disputes comme ça. Quand ils font n’importe quoi certains jours, je leur dis que je suis en colère, que je suis déçue qu’ils m’épuisent. Je crie aussi, souvent.
Mais ils savent. Ils savent que quelques minutes après j’ai passé l’éponge, qu’on peut se refaire des câlins, que je les aime à la folie et pour toujours. Je crois justement que c’est cette sécurité affective forte qui nous permet de nous dire les choses sans avoir peur de se perdre.
Mes enfants ont 6 et 2 ans, et leur empathie est énorme. Ils sont matures, sociables et intelligents (rassure-toi ils savent aussi très bien être chiants). Et je crois que, finalement… ces belles qualités se sont construites grâce à notre relation si forte et sincère. Ils savent qui je suis vraiment, connaissent mes forces et mes faiblesses et la taille de mon amour. Et il en est de même pour leur papa. Et dans notre couple.
Ce que je veux te dire au final, c’est que… tu as raison de vouloir tendre vers la bienveillance et faire preuve d’empathie envers tes enfants. Tu as raison d’essayer de changer des réflexes d’éducation que tu sens inadaptés. Mais commence déjà par être bienveillante envers toi-même. N’exige pas de toi un changement radical pour coller aux tendances et injonctions du moment, reste toi-même, vas-y doucement et fais au mieux, accepte aussi de te rater. Prends de la distance avec ce que tu vois sur Internet. Parce qu’au final ce qui fait la différence c’est l’amour et l’attention sincère que tu portes à tes enfants et le lien que tu tisses chaque jour avec eux. Ils te veulent épanouie, sincère, remplie d’amour.
ET TOUT IRA BIEN.
#leféetembrassefort
Comment
C est tellement juste.
Surtout cette bataille entre l envie de bien faire et ce qu on arrive à faire, cette opposition avec le papa.
Ces excès de colères qu on regrette aussitôt parce qu on est fatiguée.
Merci de nous rappeler qu on est seulement et entièrement des mamans !